Histoire et contexte

L’Herberie du Foraz s’inscrit dans une longue tradition de médecine par les plantes, cueillies et cultivées dans les Alpes. Basée sur un savoir ancestral et soutenue par les ducs de Savoie, cette pratique s’est particulièrement développée à partir du XIVe siècle, avant d’être peu à peu remise en question par la révolution industrielle, jusqu’à la suppression en 1941, du titre d’herboriste. Depuis une trentaine d’années, grâce au travail de passionné(e)s et du regain d’intérêt pour les médecines naturelles, la culture des plantes aromatiques et médicinales connaît un nouvel essor.

Les régions alpines ont longtemps été des régions difficiles à vivre. La santé a toujours été un bien précieux pour ne pas priver la communauté d’individus qui participent aux travaux agricoles. Depuis toujours, les plantes ont ainsi fait partie de la médecine populaire savoyarde, qu’elles soient cueillies en montagne ou cultivées dans les potagers ou «jardins des simples».

La Savoie, territoire fait de vallées, de lacs et de massifs, est riche d’histoire en matière de pharmacopée, d’herboristerie et de botanistes. Le plus célèbre d’entre eux, le Genevois Jean-Jacques Rousseau en a été un des plus formidables ambassadeurs, fasciné par la beauté de la flore et des plantes lors de ses promenades philosophiques sur les sentiers aux alentours de Chambéry et Annecy. Une de ses admiratrices, Mme de Warens, eut ainsi pour projet d’établir un jardin royal des plantes à Chambéry, placé sous la direction de son jardinier et amant, qui, hélas, mourut subitement et enterra ce projet avec lui.

Une histoire qui remonte à 1275


Cette histoire entre la Savoie et la pharmacopée des plantes, aujourd’hui un peu oubliée, remonte pourtant à bien longtemps. Depuis au moins 1275, des écrits de la cour de Savoie ont conservé les noms de toute une série de personnages fabricant des médicaments basés sur l’usage de plantes tels Martynus appothecarius de Vienna (1275), Johanes Florentinus (1325), Leonardus de Taurino (1334), Garinus de la Roche (1339), etc.  La première règlementation de la pharmacie en Savoie parvenue jusqu’à nous date de 1430. En 1565, le duc de Savoie, Emmanuel-Philibert, confiait à son médecin personnel, le proto medico Marc Antoine Capra, les fonctions de « super intendant et principal ministre de l’art de la santé », avec pouvoir d’inspecter toutes les officines de ses domaines et de faire subir un examen à tous les apothicaires qui voudraient s’établir. Après l’entrée des troupes révolutionnaires françaises en Savoie en 1792, la pharmacie s’organisera suivant les lois élaborées à Paris.

Jusqu’à la disparition des herboristes en France


En France, le premier diplôme d’herboriste, autrement dit de vendeur de plantes médicinales fraîches et sèches, est créé en 1778 : la profession d’herboriste est reconnue comme un corps de métier sous la tutelle de la Faculté de médecine au XVIIIe siècle et des Écoles de pharmacie au XIXe siècle. Codifié à plusieurs reprises au cours du XIXe et au début du XXe siècle, le diplôme est supprimé par la loi du 11 septembre 1941 promulguée par le régime de Vichy.
Plusieurs propositions de loi intervenues depuis ne réussissent pas à faire reconnaître la profession d’herboriste. Toutefois, un décret de 1979 établit une liste de 34 plantes autorisées à la vente en dehors des officines de pharmacie, liste portée à 148 en 2008, sur les 546 plantes inscrites à la Pharmacopée française. Les producteurs et les distributeurs de ces plantes ne peuvent toutefois donner aucune indication à visée thérapeutique, faute d’un diplôme reconnu. En 2018, le décès de Marie Roubleu, à l’âge de 97 ans, signifie la disparition de la profession d’herboriste, au sens officiel du terme, dont elle était la dernière représentante.

Des valeurs redevenues modernes


Néanmoins si les herboristes s’éteignent, l’herboristerie persiste et revit sous une forme nouvelle d’apprentissage plus personnelle grâce à des écoles de plantes (comme l’École lyonnaise de plantes médicinales et des savoirs naturels, l’École des plantes de Paris ou encore l’École bretonne d’herboristerie à Plounéour-Ménez), des associations, des groupes d’amateurs et des ethnobotanistes qui œuvrent à transmettre ces savoirs culturels et naturels.  

Le développement de la phytothérapie, basée sur l’utilisation des propriétés pharmacologiques naturelles des molécules contenues dans les plantes, connaît également un regain depuis les années 1960. En France, elle est officiellement reconnue comme médecine à part entière depuis 1986. Elle se décline en plusieurs spécialités qui utilisent les plantes à des fins médicales dont, entre autres, l’aromathérapie, la gemmothérapie et l’homéopathie.

En conséquence de cette histoire mouvementée et d’une réglementation de l’usage des plantes devenue très stricte, une grande partie de ce savoir ancestral a été perdue et maintes plantes et leurs propriétés médicinales ont été oubliées. L’Herberie du Foraz s’intéresse particulièrement à ce savoir tombé aux oubliettes en l’enrichissant d’études plus récentes et des innovations développées localement, mais également en Suisse, en Allemagne et ailleurs, dans le respect et le cadre de la réglementation en vigueur.